La Cité agricole

Vue aérienne contemporaine :

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Inspirée par les cités ouvrières du nord de la France, médaille d’or à l’Exposition Universelle de 1889, la Cité Agricole de Champigny en Beauce – conçue et financée par François-Philibert Dessaignes – restera unique en son genre. Émile Cacheux, ingénieur des Arts & Manufactures, nous en donne la description suivante (Etat des Habitations Ouvrières, Paris, 1891) :

« M. Dessaignes, ancien député, maire de Champigny [en Beauce], a construit une cité pour loger convenablement les ouvriers qu’il emploie dans une ferme modèle. Il espère que son exemple sera suivi et que la population de nos campagnes trouvant dans les exploitations agricoles les mêmes avantages que dans les manufactures, le mouvement d’émigration qui pousse les paysans vers les centres industriels s’arrêtera. Comparées aux habitations des communes voisines, composées uniquement d’une seule chambre ou père, mère et enfants de tous âges et de tous sexes sont accumulés, où l’aération est insuffisante, où les eaux ménagères, les fumiers et les purins infestent le sol sur lequel repose l’habitation, les maisons de M. Dessaignes sont des véritables modèles. Chacune d’elles se compose d’une chambre à coucher et d’une cuisine. Un escalier permet de monter facilement à un grenier spacieux ; une petite cave voûtée existe sous la maison. Les dépendances sont : une écurie, une étable, une petite grange, un toit à porcs, un poulailler et un jardin.

Les habitants ont la jouissance d’une pompe et d’un four ainsi que de privés bien disposés.

La cité se compose de trente-quatre maisons, dont l’une est destinée à un médecin, une deuxième à un vétérinaire, une troisième à une boulangerie et une quatrième à un bureau de postes et télégraphes. Pour décider l’Etat à établir un bureau de poste à Champigny [en Beauce], M. Dessaignes lui a concédé la jouissance gratuite, pendant dix-huit ans, de la maison qu’il a agencée spécialement pour ce service. Les maisons de la cité sont desservies par deux rues qui ont respectivement huit mètres et dix mètres de largeur. Une place plantée d’arbres se trouve au milieu de la cité, elle a une superficie de vingt-mètres de large sur soixante-treize mètres de long.

Le niveau de l’eau, fournie par les puits, est à une distance de deux mètres du sol.

Chaque maison revient en moyenne à 5000 francs ; elle est louée à raison de 100 francs, ce qui représente un revenu brut de 2 % du capital engagé.

M. Dessaignes a consacré un capital de plus de 200 000 francs à son œuvre, qui comprend, outre les maisons pour agriculteurs valides, une maison de retraite pour les vieux ouvriers agricoles, une salle d’asile et diverses autres institutions. »

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En 2009 : la Poste est toujours là !

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En découvrant il y a une vingtaine d’années ces cartes postales de la Cité Agricole, un détail avait retenu mon attention : les portes logées dans les angles des maisons, comme c’est le cas pour le bureau de poste de la Cité. Pourquoi cette disposition ? Éviter de perdre de la place en utilisant un angle mort ? Dégagement pour permettre à des carrioles chargées de prendre le virage plus aisément ? Une quelconque réglementation obsolète ? J’ai longtemps pensé qu’il s’agissait d’une spécificité campiniocoise, comme ici à la Poste de la rue de la Cité :

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Jusqu’au jour où j’ai trouvé une disposition similaire dans une autre ville du Centre de la France  que je connais très bien pour y avoir mes racines : Clamecy. Le restaurant La Porte Dorée, avenue de la gare (en face du Buffet récemment démoli), avait une disposition analogue :

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Un(e) visiteu(r/se) de ce site pourrait-il m’en dire plus sur le pourquoi de ces mystérieuses portes en coin répandues dans le Centre-France ?

Mise à jour du 19 mai 2010 :

Suite à cet appel, Jean-Pierre G., visiteur attentif de ce site et d’origine campiniocoise propose :
« Une hypothèse : pour la présence des portes dans les angles des maisons destinées à l’accueil du public (poste, épicerie, café,…). Toutes les maisons et en particulier celles-là ont une marche (au moins, sinon deux) pour y accéder. Contrairement aux maisons “privées” où l’entrée se fait dans les cours intérieures, pour les lieux publics l’accès se fait à partir de la rue sans aucun recul : les marches sont nécessairement sur le trottoir.

=> Mettre les portes d’entrée sur les pignons permet de laisser une largeur normale au trottoir… »

(J’y ajouterai : cela permet également de placer les marches sur la parcelle du propriétaire, et pas sur le trottoir, propriété communale).

Mme Marie-Claude B., résidente de Champigny-en-Beauce propose également :

« Certains pans de murs sont coupés dans l’angle des maisons de champigny en beauce, d’après feu mon époux, c’est dans les angles de rues, afin de donner une marge de manoeuvre aux charettes de foin et qui ne braquaient pas comme nos véhicules actuels. »

Cette deuxième hypothèse est confortée par la présence de deux autres pans coupés en vis-à-vis sur les maisons encadrant l’entrée de la rue de la Cité, côté rue de la Fontaine. À cet endroit, prendre le virage avec une charrette de grande longueur pouvait effectivement s’avérer délicat :

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Un grand merci à tous les deux pour ces contributions. Si vous avez d’autres explications, n’hésitez pas à me contacter !

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